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Thierry Lepaon et le bureau confédéral remettent leur mandat à disposition de la CGT

ParCGT MEL

Thierry Lepaon et le bureau confédéral remettent leur mandat à disposition de la CGT

Thierry Lepaon et le bureau confédéral remettent leur mandat à disposition de la CGT

huma-titre.jpg  CLOTILDE MATHIEU, YVES HOUSSON                                                 

Hier, Thierry Lepaon a proposé que l’ensemble du bureau conféféral remette son mandat à la disposition du comité confédéral national. La commission exécutive, qui a examiné les conclusions de l’enquête sur les dysfonctionnements internes arrête sa position aujourd’hui.
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Thierry Lepaon n’a pas démissionné mais a remis, hier, selon plusieurs sources, son mandat à la disposition du comité confédéral national (CCN), tout comme les huit autres membres du bureau confédéral (direction) de la CGT, le neuvième, administrateur trésorier, Éric Lafont, ayant déjà démissionné. Une décision collective, qui semblait inéluctable devant la montée ces derniers jours des appels à la démission au sein de la confédération. Il revient maintenant au « parlement » de la CGT de décider le 13 janvier de l’avenir de son secrétaire général. « C’est comme une démission à ceci près que la commission exécutive confédérale (CEC) peut proposer une nouvelle direction intégrant des membres du bureau confédéral actuel », a expliqué Gilbert Garrel, secrétaire général de la fédération des cheminots.
 
 
Ce dernier n’a toutefois pas souhaité « donner une appréciation personnelle » sur la situation, attendant le « débat démocratique » dans la fédération des cheminots qui tiendra son bureau fédéral aujourd’hui et son comité exécutif jeudi. Selon les statuts de la CGT, il revient à la CEC de soumettre au parlement une proposition pour la direction confédérale. En clair, chaque membre du bureau confédéral qui a remis son mandat peut être repêché, d’autres candidats peuvent être proposés par la commission exécutive. Le parlement pourra ensuite valider ou rejeter l’équipe de direction proposée par la CEC. Lundi, dans le Monde, Louis Viannet, l’ancien secrétaire de la CGT de 1992 à 1999, avait estimé « que le secrétaire général se grandirait, en annonçant, avant même la réunion du CCN, sa décision de remettre son mandat à la disposition du CCN ».
 
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Les tensions restaient hier soir toujours fortes au sein de la commission exécutive qui, selon un communiqué, n’avait encore « rien définitivement acté », ses travaux se poursuivant aujourd’hui. Dès leur arrivée à Montreuil, les 56 membres de la CEC ont eu droit aux conclusions de la commission financière de contrôle (CFC), mandatée par le parlement de la CGT pour enquêter et « faire toute la lumière sur le dysfonctionnement ». Dévoilés en partie dans le Parisien mais confirmés par plusieurs membres présents à la réunion, les éléments donnés montreraient que le secrétaire général aurait touché un salaire de 5 200 euros net, puis 4 000 euros à partir de décembre 2014, alors que ce dernier avait affirmé qu’il « avait demandé à faire baisser » son salaire « dès son arrivée », en mars 2013. Quant aux travaux de son appartement, Thierry Lepaon n’en aurait vraisemblablement pas appris le montant dans « la presse » mais « se serait tenu régulièrement au courant de l’avancée du chantier », affirme le Parisien. Un premier rapport d’étape avait été rendu en décembre aux cadres de la CGT lors d’une réunion informelle, dénonçant des montants de travaux « manifestement trop élevés » ainsi que des « factures exagérées ».
 
 
Concernant la rénovation du bureau de Thierry Leapon au siège de la confédération à Montreuil, la commission financière de contrôle relève, d’après le Parisien, que la facture de 65 000 euros ne prendrait pas en compte, contrairement aux déclarations du secrétaire général, les frais de chauffage et de climatisation, dispositif « collectif ». Hier, ces nouvelles informations ont d’abord entraîné un silence de plomb dans la salle, avant d’entraîner de vives réactions entre membre de l’exécutif. Et la réaction de Thierry Lepaon n’était pas connue.

LA COMMISSION EXÉCUTIVE DU SYNDICAT PRENDRA SES DÉCISIONS AUJOURD’HUI.

La décision des membres du bureau confédéral de remettre leur mandat en jeu apparaît comme un premier pas vers la sortie d’une crise qui avait éclaté le 29 octobre, après les révélations du Canard enchaîné sur les travaux de rénovation de l’appartement de fonction de Thierry Lepaon (120 000 euros). C’est alors un premier choc, profond, pour le syndicat, amplifié par l’écho que donne l’ensemble de la presse à ces informations.
 
 
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Le coup est d’autant plus sévère qu’il intervient à un mois des élections professionnelles dans la fonction publique. Devant le comité confédéral national, le 4 novembre, Thierry Lepaon reconnaît une faute collective, avec des responsabilités individuelles, et pointe le doigt sur les comportements déloyaux de dirigeants tout en incriminant une violente campagne médiatique. Le 5, l’ancien secrétaire général Bernard Thibault parle, sur Europe 1, de «mauvaise passe » pour le syndicat et prend des distances avec Thierry Lepaon en disant faire « confiance à ceux qui sont élus pour diriger la CGT » pour résoudre la crise, sans citer le nom de son successeur.
 
Le 25 novembre, deuxième choc: le Canard enchaîné affirme que la CGT a dépensé 62 000 euros pour rénover le bureau de son numéro un. Pour cette facture, comme pour celle concernant l’appartement, l’intéressé affirme n’avoir pas été informé. Le 1er décembre, la crise prend une dimension supplémentaire avec la révélation, dans l’Express, des indemnités perçues par Thierry Lepaon (26 650 euros selon lui) lors de son départ de l’union régionale de Normandie, en 2013, avant de rejoindre la confédération à Montreuil. Pour beaucoup de militants, cette dernière affaire est vécue plus douloureusement, rien ne semblant venir la justifier.
 
Tout au long du mois de décembre, des fédérations et des unions départementales prennent position et demandent, de plus en plus souvent, la démission du secrétaire général et, parfois, celle du bureau confédéral au complet. Après les fédérations des services publics, de la fonction publique, de la construction, celle de la métallurgie, par exemple, juge le 19 décembre que « le secrétaire général a perdu toute crédibilité en interne comme en externe de la CGT et que la seule option est de démissionner ». Mais, estimant que les membres du bureau confédéral « ont une part de responsabilité importante dans la situation », elle affirme que « la question de leur démission devait être également posée ».
 
Le 16 décembre, lors d’une assemblée des secrétaires généraux des organisations, Thierry Lepaon répond point par point à toutes les accusations dont il fait l’objet. À la suite, la direction convoque la commission exécutive pour les 6 et 7 janvier, afin de « valider des propositions d’évolution totale ou partielle de la composition du bureau confédéral ». Le manque de cohésion de cet organe exécutif apparaît en effet désormais flagrant. Cela renvoie aux conditions de sa mise en place, ainsi qu’à l’élection de Thierry Lepaon, lors du 50e congrès en 2013, après de longs mois de tensions, de divisions, d’affrontements. Avant l’intervention, lundi, de Louis Viannet, d’anciens dirigeants du syndicat étaient entrés dans le débat, en particulier Georges Séguy, qui, dans une tribune publiée par l’Humanité, avait, à rebours du discours de Thierry Lepaon, estimé que « la médiatisation n’est pas l’essentiel ».
 
Au-delà des problèmes de direction, et des graves dysfonctionnements internes mis au jour, cette crise est, pour beaucoup, l’occasion de poser des « questions de fond ». Il faut, dit-on par exemple à la fédération de la métallurgie, « définir une stratégie et une orientation politique claire comprise des militants, des syndiqués, premières victimes de cette situation ». Les choix de structuration du syndicat, son rapport au politique, aux autres syndicats, sont aussi en débat. Autant de sujets qu’il reviendra à la nouvelle direction de traiter, dans la perspective du prochain congrès et dans un contexte d’exigences accrues d’écoute et de débat de la part des militants.

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